5.5/10A Vampyre Story - Test

/ Critique - écrit par gyzmo, le 23/12/2008
Notre verdict : 5.5/10 - Crocs incolores (et indolores également) (Fiche technique)

Tags : vampyre story mona aventure jeux video humour

En surfant sur la mythologie vampirique suivant le prisme de la parodie, A Vampyre Story  aurait pu rentrer dans les rangs des standards du genre. Sauf que non...

N’y allons pas par quatre chemins : en surfant sur la mythologie vampirique suivant le prisme de la parodie, A Vampyre Story  aurait pu rentrer dans les rangs des standards du genre, à quelques pas du célèbre bal de Polanski ou des vampires de Tom Holland, par exemples. Mais l’humour raz des pâquerettes et bourrin digne d’un congrès de Troll en chaleur fait tellement pâle figure face aux ténors, que cet instant de glorification n’arrivera jamais. La vulgarité et les lourdeurs des nombreux dialogues sauront sans nul doute tirer quelques larmes d’hilarité aux plus généreux. Les autres, peut-être plus farouches ou en manque de putain de vrais bonnes histoires, à force de lourdeurs et d’insinuations sous la clôture, auront du mal à décocher un léger sourire devant la bêtise assumée des personnages de cette « aventure » qui, lorsqu’ils ne sont pas portés sur la chose ou en train de se gueuler dessus, adorent philosopher sur le pipi et le caca. De la littérature de cabinet, en somme, au service d’une histoire maigre comme un filet, pour ne pas dire insignifiante. Et ce truc, là, se dit être dans la lignée des meilleurs jeux de LucasArts ? Laissez-moi rire…

HA HA HA !


Brrr… Je sens comme un froid, tout d’un coup, pas vous ? Certes, pour une entame, je n’y vais pas avec le dos de la cuillère, mais j’enrage tellement de voir qu’un si charmant point’n click est desservi par un esprit aussi putride, qu’il m’est difficile de ne pas m’éparpiller en milles morceaux. Parce que A Vampyre Story, au-delà de son scénario riquiqui et de ses joutes verbales d’attardés (entres autres miettes que je réserve sous la dent pour plus tard), renferme dans son paquetage tout un tas de vertus à vous filer de petits frissons bien agréables le long de la colonne vertébrale (voire plus si affinités) ! En premier lieu, la fabuleuse charte graphique et ses décors 2D peints à la main, à deux doigts de l’univers fantastique et coloré des
Noces Funèbres de Burton (ça, c’est pour les goinfres), et surtout en parfaite symétrie avec le level design cartoonesque de La Malédiction de l'Île aux Singes (1997), troisième opus de la saga des Monkey’s Island (ça, c’est pour les fins gourmets). Ce dernier rapprochement n’a d’ailleurs rien d’étonnant puisque à la tête du tout jeune studio de développement Autumn Moon se trouve l’un des papas de Guybrush Threepwood : Bill Tiller. Heu… Qui ça ? BILL TILLER ! Responsable des décors de The Curse of Monkey Island – l’épisode le plus abouti d’un point de vue esthétique (paraît-il), le Tiller, à défaut d’être doué pour manier la plume avec grâce, est un sacré virtuose lorsqu’il s’agit de créer des ambiances superbes, typiques… et souvent imitées par de moins talentueux architectes que notre bonhomme. Les différentes pièces du château Ouargue (théâtre de la première partie du jeu), et surtout la cité et les alentours de Vlad’s Landing qui constituent la seconde moitié du périple, ont bénéficié d’un coup de pinceau excellent, avec ses perspectives tortueuses (et peu crédibles…), ses nombreuses zones scriptées, et ses associations harmonieuses de couleurs ou ses placements de très belles lumières. Il se dégage de ces différents environnements une incontestable poésie.


Une poésie, en total déséquilibre avec le caractère grossier de ses personnages ! Ceux-ci, à deux ou trois exceptions loupées près (le ridicule monstre du Lac et l’horrible version démoniaque de Shrowdy), sont passés entre les mains plus ou moins expertes des concepteurs 3D avant d’être douchés par un rendu cartoon aussi réussi, sinon plus, que celui de Runaway 2. Nous n’en dirons pas autant des cinématiques, franchement pas mémorables, mais l’animation fait également partie des points forts du titre. Mona de Laffitte en première ligne qui, avec ses divers mouvements, sa démarche précieuse (et trèèèèèèèès très lente) et ses manières rigolotes ont largement de quoi faire valser l’athlétique Brian Basco. Puisque j’aborde la danse (si, si, cherchez bien…), laissez-moi vous chanter les louages de la bande originale de A Vampyre Story. En un mot : FORMIDABLE © CharlieOleg ! Les plages musicales envoûtent, transportent, apaisent.  On croirait entendre du Danny Elfman ou Jeremy Soule. Rien que ça. A noter que le doublage tricolore est passé à la trappe, au profit d’une VO savoureuse. Par malheur, les sous-titres dans la langue de Molière sont d’une médiocrité absolument insoutenable ! Pas nécessairement au niveau de la traduction, à mon sens bonne. Par contre, le choix d’une typographie illisible (police fantaisiste, avec effets malvenus d’ombrage), incrustée par moment à la one again, dans des coloris fluorescents à vous filer un décollement de rétine, et suivant un rythme d’affichage expéditif, tout ce boulot de post-prod bâclé ne fait que détériorer le plaisir de découverte de A Vampyre Story. Les petits malins me diront : si ce problème énervant peut à lui seul user le joueur et le détourner de la vulgarité ambiante contenue dans la plupart des dialogues et certaines situations (dixit moi-même), pourquoi hurler aux loups ?

HA HoOoooOOOooooUou !


Parce que, justement : le soft est souvent grossier, son humour, toujours facile, mais ça ne l’empêche pas d’être parfois drôle, stimulant et absurde. Tout comme les énigmes qui, en fait, n’en sont pas vraiment. Le principe reste très archaïque : trouver l’objet, à la rigueur le combiner avec un autre, l’associer avec un élément du décor. Fin du brainstorming.  Pas de puzzles, ni de trucs bizarres. Rien d’insurmontable, en somme. A la manière des casse-tête insolites qui ont fait la réputation de LucasArts, A Vampyre Story tente de nous faire croire que ses quêtes vont donner du fil à retordre. Mais à part un ou deux passages fourbes (telle que cette satanée fiole de parfum invisible à l’œil nu), les embûches sont rares et un peu de logique tirée par les cheveux fera l’affaire pour progresser rapidement. Il faut dire que le gameplay est secondé par un système d’aide à la Secret Files où une pression sur l’une des touches du clavier fait apparaître toutes les zones intéressantes d’un tableau. Le menu contextuel, quant à lui, n’est pas sans rappeler celui d’un bon vieux Full Throttle. En un clic, il permet d’avoir accès à quatre interactions différentes : regarder, parler, toucher, voler. Voler ? Comme un pickpocket ou comme l’oiseau ? Comme une chauve-souris, pour être tout à fait précis ! Car n’oublions pas que, même si elle refuse cet héritage, Mona est avant tout un vampire, capable de se transformer en chauve-souris (pour accéder à des endroits haut perchés ou emprunter des passages exigus). Le talent n’est pas accessoire, il est bien implémenté dans le système de quêtes et autorise même certains raccourcis pratiques car, comme il est de coutume dans ce genre de jeu, les aller-retour abondent. Ce qui n’empêche pas la balade d’être extrêmement brève...

Les temps sont brusques. C’est peut-être pour cette raison que, de plus en plus, les studios de développement – sous l’emprise des maisons d’éditions, sont obligés de jouer les apprentis sorciers et préparent leur créature petit bout par petit bout. Il ne tient alors qu’au consommateur de rassembler la bête avec le fil d’or de sa bourse pour avoir un tout complet. C’est sûrement pour cette raison que, de plus en plus, les jeux vidéo commercialisés sortent par épisodes, ou en vue d’une « trilogie », et laissent un goût d’inachevé dans la bouche. A Vampyre Story répond à cette nouvelle stratégie commerciale et souffre des mêmes symptômes que ces congénères malmenés : durée de vie saignée à blanc, scénario coupé en plein vol, protagonistes en gestation… Avec toutes ces tares, comment voulez-vous qu’un titre accroche ? Pas étonnant que la suite du jeu de Autumn Moon ait pour le moment le cul entre deux chaises. Sans compter la vulgarité ! Je vous en ai déjà parlé ? Non ? N’y allons pas par quatre chemins…