Visite chez Cyanide, en compagnie de Jean-Paul Huchon

/ Actualité - écrit par Guillom, le 27/10/2014

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Le président du Conseil Régional d’Île-de-France visitait jeudi dernier le studio de développement Cyanide, un des partenaires privilégiés de Focus, dont il est souvent question ici. Ce fut l’occasion d’aborder les difficultés rencontrées par le studio, mais aussi par l’ensemble du secteur, sur le plan financier.

Une semaine après la publication du Baromètre annuel du Jeu Vidéo, Krinein a eu l’occasion de vérifier sur le terrain les conclusions dudit rapport. Bienvenue chez Cyanide, studio presque parisien, célèbre pour avoir développé Pro Cycling Manager, Blood Bowl, Games of Thrones, Of Orcs and Men, Jean Passédemeyer*… Evidemment, nous ne sommes pas ici par hasard : ce jeudi, Jean Paul Huchon, président du Conseil Régional d’Île-de-France, visite le studio. Il ne s’agit pas seulement de serrer des mains, l’élu est ici pour discuter de la situation financière du jeu vidéo en France et, accessoirement, pour en apprendre plus sur le fonctionnement de cette industrie. En effet, Patrick Pligersdorffer, le patron de Cyanide, est aussi président de Capital Games, le cluster qui rassemble les entreprises du secteur en Île-de-France.


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Commençons par évoquer la structure interne du studio. La hiérarchie n’y est que très peu marquée et la majorité des postes sont en CDI. On retrouve plus ou moins les mêmes données que celle du Baromètre. Néanmoins, il ne faut pas généraliser la situation à l’ensemble des studios. Il n’existe pas de convention collective des entreprises du jeu vidéo, chacune a ses propres règles. Ce point n’était pas inclus dans le rapport, mais explique le manque de cohérence du secteur en France. Néanmoins, les studios français, nombreux, ne se sentent pas en concurrence les uns par rapport aux autres. Aux dires de Patrick Pligersdorffer, c’est l’entraide qui prime, à travers des transferts de projets notamment. « On se sent plus en concurrence avec les studios internationaux » précise-t-il.

Le jeu vidéo souffre encore de sa mauvaise image

De la solidarité, il en faut. Le jeu vidéo manque de fonds et effraie les investisseurs. Par exemple, la TVA appliquée à la vente des jeux s’élève à 20%. En effet, il est bien connu que le jeu vidéo n’est pas une industrie culturelle, contrairement au livre, qui bénéficie d’une TVA de 5%. Le PDG de Cyanide  résume : « Le studio gagne au final autant que l’Etat ». Ce qui est très peu, d’autant que l’industrie du jeu vidéo n’est que très peu soutenue par les pouvoirs publics. Le Crédit d’Impôt Jeu Vidéo « est particulièrement bien pour un studio », mais malgré cette aide substantielle, on est encore bien loin des fonds accordés au cinéma ou au livre. Un comble, le jeu vidéo étant la « première industrie culturelle en France, sinon au monde », soulignait récemment la secrétaire d’Etat au numérique.

Chez Cyanide, on aime la bière naine, les jeux de figurine et la nostalgie 

Mais « dans l’océan du numérique, le jeu vidéo est oublié ». Il faut chercher du côté des collectivités locales, dont les contributions aident 25,6% des studios, mais ne représentent que 3,6% des budgets de production. Le cas de « PM’up », une subvention mise en place par la Région IDF, est abordé. Cette mesure a permis à Cyanide de renforcer sa position sur le marché international, en créant un poste chargé de l’export. Bon, on triche un peu, PM’up ne concerne pas uniquement le secteur du JV. Mais ça compte !

Si le jeu vidéo est si peu aidé, c’est, en partie, à cause de la réputation qui lui colle à la peau. Violent, addictif, pornographique… il est à l’image du rock & roll : un produit labellisé par Satan en personne ! Un produit aussi diabolique ne saurait bénéficier du soutien de l’Etat, et encore moins du statut de « bien culturel ». Néanmoins, ce problème d’images tend, peu à peu, à disparaître. Mais l’ignorance reste le principal vecteur de préjugés, c’est pourquoi les entreprises, ainsi que certains acteurs publics, font un véritable travail de pédagogie autour du jeu vidéo.

La dématérialisation, des hauts et débats

En outre, parler d’exportation n’est pas anodin. Et pour cause, il est quasiment impossible d’amortir le coût de production d’un jeu sur le seul marché français. Il est donc nécessaire de viser à l’international. L’essor des plates-formes de vente dématérialisée a été particulièrement bénéfique aux studios prônant l’auto-édition. Les antiques boîtes étaient onéreuses, l’exportation de produits physiques a un coût et en cas de mauvaises ventes, les jeux en boîte sont une perte nette pour l’entreprise. Des écueils que Steam et consorts ont permis d’éviter. Toutefois, la digitalisation des contenus n’a pas fondamentalement bouleversé les modèles économiques. « Steam dégage des marges équivalentes à celles de la Fnac, ce qui n’augmente pas vraiment nos bénéfices » commente Patrick Pligersdorffer. « D’autant que Steam a les moyens de réduire ses marges ».


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Avec tout ce blabla économique, nous avons complètement négligé les informations relatives aux jeux développés par Cyanide. Pas d’annonce retentissante, mais quelques pistes distillées ça et là. Styx, Master of Shadow cartonne et pourrait bien connaître une suite. Celle-ci devrait s’accompagner d’une bande dessinée. Cela n’a rien d’étonnant : Cyanide entretient un certain nombre de liens avec Angoulême, patrie de la BD. Par Zeus, on aime les licences transmédia chez Krinein, et on espère que ce projet verra le jour. Grosse déception toutefois, on ne sait toujours pas quand sortira le très attendu Blood Bowl II. 2015, sûrement en début d’année… Chers Krinautes, restez à l’écoute ! Bientôt, nous vous dévoilerons la date de sortie du nouvel opus de Blood Bowl.  Et vous saurez également  si Styx, Master of Shadow vaut vraiment la dépense.

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* Avec ce jeu de mot catastrophique, je décrète officiellement l’humour mort et enterré (sauf pour la personne qui a cherché sur Google si Jean Passédemeyer était vraiment un jeu vidéo…