7/10Sid Meier's Civilization V - Test

/ Critique - écrit par gyzmo, le 16/10/2010
Notre verdict : 7/10 - Guerre et Paix en toute simplicité (Fiche technique)

Tags : civilization unites meier sid civilisations tour victoire

Jeu exigeant et bouffeur de temps dans l'âme, Civilization V a le mérite de se rendre plus accessible aux néophytes et ne devrait pas avoir de mal à séduire les nouveaux venus.

Voilà presque vingt ans que Civilization a vu le jour sous la houlette de Sid Meier. Vingt années durant lesquelles de nombreuses versions et extensions se sont succédées, gonflant un peu plus à chaque sortie l'aura mythique de ce jeu de stratégie au tour par tour. Dernier en date, le quatrième opus et ses add-ons avaient placé haut la barre, rendant inimaginable l'appréciation « peut mieux faire ». Que penser alors de la nécessité d'une cinquième édition ?

Visuellement, le soft se dote d'une charte art déco appréciable et raffinée, moins chargée que d'ordinaire, mais proposant dans les moindres recoins le panel d'outils que les habitués de Civilization connaissent sur le bout des doigts. Les liens hypertextes sont nombreux, la navigation entre les divers icônes et menus est relativement fluide. En quelques clics, l'information recherchée nous tombe sous le nez. Plus que les quatre conseillers qui guideront les débutants, la célèbre Civilopédia demeure une mine de renseignements pour qui veut percer les subtilités du soft - le manuel de 240 pages n'étant disponible qu'au format pdf dans la version boîte. A l'instar de la superbe cinématique d'introduction, les ambiances 3D sont fournies en détails animés, affichent de jolies textures et bénéficient de modélisations réussies, principalement du côté des Dirigeants à la classe internationale. Même la carte stratégique 2D fait plaisir à l'œil. L'ensemble ne rivalise par avec la beauté du dernier Anno, mais les graphistes de Civilization V ont fait du bon boulot. L'illustration sonore et musicale n'est pas en reste. Sur ces points, en tous cas, difficile de reprocher quoi que ce soit.


Le déroulement d'une partie n'a pas bougé d'un pouce : vous débutez avec un colon par l'intermédiaire duquel votre ville sera fondée sur l'emplacement de votre choix. A partir de là, l'objectif sera d'aménager son territoire, d'y exploiter les ressources naturelles correspondant à chaque terrain, d'aller explorer les environs et d'entretenir des relations (plus ou moins mouvementées) avec le voisinage, tout en construisant divers bâtiments et unités civiles ou militaires. Tout cela, jusqu'à ce que la condition de victoire - pouvant être culturelle, scientifique, militaire ou diplomatique - soit remplie. Et ce parfois après plusieurs jours de jeu. Car suivant la foule de paramètres configurés pendant la création de son scénario, comme à son habitude, une partie de Civilization s'avère extrêmement chronophage. Il faut d'ailleurs reconnaître que la plupart des repères phares de la franchise sont toujours d'actualité : les doctrines (sociales et simplifiées, mais ayant un vrai poids sur la puissance de l'empire), les attaques aléatoires de nos amis Barbares, les interactions améliorées avec les civilisations voisines (échanges commerciaux et diplomatiques), la découverte des merveilles du monde, la naissance de personnages illustres, les produits de luxe, le pillage, les ruines... Sans oublier le fer de lance d'un Civilization digne de ce nom : l'arbre des technologies. Ce dernier paraît moins fouillé et labyrinthique que dans les précédents épisodes. Les débutants têtes en l'air apprécieront l'épuration - et le côté illogique de certaines branches de l'arbre (des découvertes faites sans passer par des étapes fondamentales). Les vétérans obtus du ciboulot tireront sans doute la tronche, surtout lorsqu'ils prendront acte de la disparition de certains mécanismes tout de même dispensables (religion, pollution, espionnage...).

Bien sûr, les innovations majeures de ce cinquième volet répondent à l'appel, rehaussant par bien des aspects les qualités originelles et colmatant les quelques manques de la franchise. Tout d'abord, les Cités-états - puissances qui n'ont aucune prétention de conquête, enrichissent considérablement les champs de victoire. Par leur entremise, le joueur malin comme un singe peut tout à fait remporter une victoire sans engager son armée directement dans un conflit d'envergure. En leur fournissant de l'or ou des unités, en répondant à leurs requêtes annexes (procurer telle ressource, endiguer telle invasion barbare, écraser telle Cité-état rivale...), l'influence gagnée auprès de ces éventuels partenaires  permet réellement d'élaborer tout un tas de stratégies pour atteindre ses objectifs. L'attention permanente et les ressources monopolisées par ces puissances capricieuses ne seront pas du goût de tout le monde. Mais les hommes de l'ombre et les pacifistes devraient y trouver leur compte. D'autre part, étant donné qu'aucun droit de modulation du taux des impôts n'est plus accordé, la gestion de son or s'avère drastique et méticuleuse, ne serait-ce que pour supporter les nombreux éléments produits dont l'entretien coûte une petite fortune. Là encore, les choix du joueur seront sujets à quelques dilemmes.


Côté expansion et protection territoriale, les villes attaquent à distance tout ennemi s'approchant un peu trop de ses fondations et peuvent embarquer une unité militaire pour gonfler ses défenses et son attaque. Petit plus onéreux mais super pratique, le joueur contrôle désormais les frontières de son empire grâce à l'achat des parcelles avoisinantes du terrain. Ce dernier, en plus d'offrir différentes ressources, procurent des avantages et des inconvénients aux unités militaires. Des archers sur une colline occasionneront plus de dégâts. Des guerriers en zone boisée auront une meilleure défense. La proximité d'une rivière engendrera un malus de déplacement et d'attaque. Les exemples du type sont légion ! Ajoutez à ceci le gain de points d'expérience d'une unité et la possibilité de promouvoir leurs compétences (dégâts, portée du tir, jauge de vie, disposition à tel terrain...) - façon jeu de rôle, ou le déploiement obligatoire de son armée sur ces différents types de terrain - l'empilement par case n'étant plus disponible, et l'on se retrouve avec des affrontements typés wargame qui faisaient défaut à l'ensemble des anciens Civilization.

Ceci dit, tout n'est pas toujours rose, faute à une intelligence artificielle balourde. Inutile d'automatiser des tâches de ses unités : entre les ouvriers qui construisent n'importe quoi, les éclaireurs qui explorent la carte sans se soucier de déclencher une guerre en traversant les territoires adverses ou le pathfinding abominable qui ne sait faire que de grands détours inutiles, vous serez nombreux à vous arracher les cheveux devant autant de maladresse. Les civilisations ennemies, quant à elles, ont parfois des comportements schizophrènes incompréhensibles. Sans nuances, elles sont capables de passer de la bonne entente à l'agressivité totale. Leurs unités font souvent du rentre-dedans, sans prendre avantage des terrains, et jusqu'à se prendre une branlée, avant de demander la paix. Systématiquement. Les tactiques d'attaque et de défense tournent alors en rond, l'ennui à ses basques. Pourtant, un effort a été fait pour rendre crédible certaines réactions. Si vous flirtez un peu trop avec les frontières adverses, la suspicion sera reine. Si vous engagez trop souvent les hostilités, Cités-états  et grandes nations témoins de vos actes vous taxeront de « sanguinaire »... avant de tous vous attaquer en même temps. Malheureusement, il faut le reconnaître, ce n'est sans doute pas via le multijoueurs que le challenge se verra dopé, les épisodes de Civilization étant principalement destinés et pensés pour le plaisir solitaire. Reste encore la possibilité de jouer en mode (très) difficile. Là, par contre, les méninges devront être parfaitement aiguisées.

Jeu exigeant et bouffeur de temps dans l'âme, Civilization V a le mérite de se rendre plus accessible aux néophytes et ne devrait pas avoir de mal à séduire les nouveaux venus qui n'ont pas encore testé une production signée Sid Meier. Pour les vétérans, l'heure n'est peut-être pas encore venue de quitter le quatrième opus et ses extensions pour le dernier né de Firaxis Games. Mais dans les jours, dans les mois à venir, mods de la communauté des joueurs et add-ons officiels combleront sans nul doute l'attente des plus critiques.