Silent Hill ou l'art de la peur
Jeux Vidéo / Dossier - écrit par Mandark, le 11/03/2010Tags : silent hill jeux video film peur joueur
Silent Hill a 10 ans, et le récent Shattered Memories prouve qu'il a bien toutes ses dents! La saga méritait bien un dossier, même si celui-ci est hélas "un dossier trop petit pour un univers trop riche", comme pourrait le dire à juste titre un certain ministre de la culture.
Avant propos
Silent Hill étant une saga d’une immense richesse thématique dont (presque) chaque épisode mérite à lui seul un dossier à part entière, nous nous cantonnerons ici à parler des mécanismes de la peur propres aux divers épisodes de la série.
Dans le genre pas si vieux du survival horror, Silent Hill à réussi l’exploit, alors que personne ne l’attendait à l’époque, de s’imposer instantanément comme l’expérience de flippe ultime pour beaucoup de gamers qui s’y sont essayé. Une expérience non seulement autrement traumatisante que de jouer à Resident Evil mais également plus dérangeante que beaucoup de fleurons du genre horrifique en littérature ou au cinéma. Ce tour de force était du au fait que le joueur se retrouvait émotionnellement impliqué comme jamais au sein d’un cauchemar où les développeurs prenaient un malin plaisir à brouiller petit à petit tous les repères séparant la réalité de la fiction, au point de lui faire douter de sa propre santé mentale.
Silent Hill. Le début de la flippe.Le premier Silent Hill est né de l’imagination de Toyama Keiichiro. L’histoire veut que ce dernier ait un jour poussé la porte des responsables de Konami pour leur déclarer, en substance, que Resident Evil ne l’avait jamais impressionné et que lui était capable de faire un jeu qui fasse vraiment peur. Ainsi, là où Mikami Shinji et sa série proposent une approche très hollywoodienne et qui base son gameplay sur une flippe « programmée », Toyama choisit lui de concevoir la peur sous un angle plus psychologique, inspiré en cela par quelques références majeures à ses yeux, notamment les peintures de Francis Bacon et les films L’Echelle de Jacob (Jacob’s Ladder-1990-Adrian Lyne) et L’Antre de la Folie (In the Mouth of Madness -1995-John Carpenter). Et à la différence de Resident Evil qui met le joueur dans la peau d’un soldat d’élite apte à utiliser facilement un arsenal létal et ses réflexes au combat pour venir à bout de monstruosités génétiquement modifiées, Silent Hill met le joueur dans la peau de Harry Mason, un écrivain détruit par la mort tragique de sa femme et qui décide de partir quelques jours en vacances avec sa fille Cheryl dans la petite station balnéaire de Silent Hill. Tandis qu’ils approchent du lieu de villégiature, une petite fille traverse soudain la route, Harry fait une embardée et la voiture termine dans le décor. Salement sonné, il perd connaissance et lorsqu’il se réveille Cheryl n’est plus là. Partant à sa recherche, il la retrouve un peu plus loin mais sa silhouette s'enfonce dans l’épais brouillard qui semble avoir pris possession de la ville. Il pénètre alors dans un dédale de ruelles, autour de lui le décor devient de plus en plus glauque et il finit par se faire massacrer par une horde de petites monstruosités avant de se réveiller en sursaut. Tout cela n’était-il donc qu’un rêve ? Ce qui est sûr c’est que Cheryl a bel et bien disparu, qu’il est bien à Silent Hill et que la ville est toujours plongée dans une épaisse purée de pois qui cache son lot d’abominations.
Horreurs dans le brouillardUne des grandes trouvailles de Toyama pour distiller l’angoisse aura été de tirer parti des limitations techniques de la Playstation, sur laquelle tournait le jeu. Ainsi l’utilisation omniprésente du brouillard et de l’obscurité dans Silent Hill permettait habilement de contourner la faible distance d’affichage de la console tout en distillant le malaise car on ne savait pas quelles atrocités on allait y trouver. Cette brillante idée en a appelé deux autres : d’abord la radio portative que Harry va trouver un peu après le début, qui ne capte aucune station mais émet un grésillement qui s’amplifie de façon désagréable à l’approche d’un danger sans que l’on puisse forcément voir celui-ci, provoquant ainsi une panique viscérale par anticipation. Ensuite, la lampe de poche dont Harry a besoin pour se déplacer dans les ténèbres de la ville mais qui a un très faible rayon d’action, ne permettant donc pas de prendre la pleine mesure de l’environnement hostile dans lequel il se trouve, et qui en plus attire les horreurs à proximité. Si Harry l’éteint les monstres auront moins de chances de le remarquer, mais il sera plongé dans une obscurité quasi-totale. L’ambiance éprouvante du jeu ne serait pas non plus ce qu’elle est sans la présence du génial Yamaoka Akira au poste de directeur du son et compositeur de la bande originale (poste qu’il conservera sur tous les opus à venir). Tous les joueurs qui ont traversé Silent Hill n’ont pas oublié les frissons d’angoisse qui leur parcouraient l’échine à l’écoute des bruits du jeu, et aussi à l'écoute de leur absence ! Car comme le dit si bien Yamaoka : « même le silence est un son », et l’utilisation stratégique de ce dernier se révèle bien souvent beaucoup plus efficace qu’une partition étudiée à base de cordes pour provoquer la trouille. Une autre énorme différence entre la façon d’installer la peur chez Mikami et chez Toyama est l’utilisation de la caméra. Là où Resident Evil découpe la progression du joueur tout au long de cadrages fixes usant (brillamment) du sentiment d’appréhension de ce qu’il va trouver au plan suivant, ceci grâce à une savante utilisation de la grammaire cinématographique des films d’épouvante (plongée, échelle de plans qui enferment le personnage), Silent Hill se présente
Jacob's Ladder, influence majeurecomme un long plan séquence qui donne constamment l’impression de suivre un cauchemar éveillé et qui, en créant la continuité dans les déplacements et les actions de Harry, empêche le joueur d’échapper à la réalité globalement déformée de cette ville démente. Et quand la caméra ne suit pas Harry elle se trouve placée de sorte à provoquer une distorsion visuelle qui achève de faire perdre ses marques, comme ce fameux plan, juste avant que le joueur ne plonge pour la première fois dans les ténèbres de la ville au début du jeu, et où la caméra située face à Harry pivote de ¾ pour finir sur un cadrage penché des plus angoissant. Tout au long de ce mouvement et en quelques secondes seulement le basculement vers une réalité « tordue » s’est installé. Simplement brillant ! Tous ces choix de mise en scène firent que Silent Hill rencontra un énorme succès à travers le monde et fut immédiatement estampillé (à très juste titre) « jeu le plus flippant du monde ».
Mais nous n’avions encore rien vu.
2 ans plus tard la Playstation a laissé la place à sa petite sœur, la PS2, et c’est sur cette machine autrement plus puissante que va débouler Silent Hill 2, aujourd’hui considéré par beaucoup comme l’expérience de flippe vidéoludique ultime jamais réalisée.
James Sunderland est un homme brisé. Il y a 3 ans sa femme, Mary, est morte d’une maladie incurable et depuis il n’est plus qu’une coquille vide. Aussi quand il reçoit une lettre signée de la main de Mary lui enjoignant de la retrouver « là où ils ont passé leurs moments les plus heureux », il se rend immédiatement sur les lieux en question, la petite ville de Silent Hill, dans l’espoir insensé que Mary l’y attend peut-être malgré le tragique événement survenu 3 ans plus tôt.
James Sunderland. "Only human"Silent Hill 2 change de réalisateur, Toyama cédant sa place à Tsuboyama Masashi, mais reprend tous les brillants éléments de son prédécesseur et réussit le tour de force de les pousser à leur paroxysme pour embarquer le joueur dans un voyage dont il reviendra difficilement indemne. Dés le début du jeu, qui prend place dans des toilettes publiques sordides à l’extérieur de la ville et où on découvre James, encore une fois un homme très ordinaire, qui se regarde dans un miroir, la Team Silent « force le joueur à accepter ce visage, sa banalité pour que le jeu démarre. Il doit accepter aussi l’esthétique très particulière de l’image, qui fut souvent décriée par les gens n’ayant aucun goût. C’est précisément le moment où ils nous donnent le contrôle du personnage »(1). Une fois possession prise de ce nouveau référant, les concepteurs du jeu vont enfoncer le clou avec un choix qu’ils estimaient à l’époque risqué mais qui s’est révélé proprement génial : l’accès à Silent Hill par la route étant impossible, James doit s’y rendre à pied en passant par le seul chemin praticable, un sentier qui court à travers la forêt sur plusieurs centaines de mètres que le joueur doit parcourir en temps réel. Ce long moment de descente fait prendre conscience de deux choses capitales. D’abord que la ville est complètement coupée du monde extérieur, et ensuite qu’après d’innombrables minutes passées à marcher on ne veut pas revenir en arrière tant ce monde extérieur semble soudain très lointain. Cette longue errance, accompagnée seulement du bruit des pas de James dans les feuilles mortes et de quelques sons, parfois lointains, parfois très proches, mais toujours indéfinissables et inquiétants, fait lentement mais inéluctablement glisser le joueur dans le piège de Silent Hill tout en faisant en sorte qu’il en prenne pleinement la mesure. Parmi les autres éléments narratifs de ce deuxième volet, deux se sont révélés cruciaux au plus haut point. Primo l’application d’un filtre granuleux sur l’image pour « échapper à l’aspect lisse, aseptisé, hygiénique de la 3D. C’est un de leurs nombreux coups de génie. Au final, ce jeu ressemble à L’Ange de Patrick Bokanowski ou à Eraserhead de Lynch »(1). Et deusio l’utilisation poussée à l’extrême du principe de « hors champ », qui « demeure éternellement celui de l’imagination en dépit de démonstrations horrifiques incessantes. C’est pourquoi le cauchemar de Silent Hill 2 ne s’arrête jamais, tout comme celui de Marilyn Burns dans Massacre à la
Le terrifiant "Pyramid head"tronçonneuse. »(2). Les apparitions horrifiques en question auront elles aussi joué un rôle primordial dans le souvenir inconfortable de cette lente descente aux enfers, de par le dégoût et la fascination qu’elles provoquèrent alors (et qu’elles provoquent toujours). Insensé mélange de formes humaines à la gestuelle syncopée, elles présentent toutes un aspect à la fois sexuellement contre nature et érotiquement troublant des plus dérangeant... sans oublier le terrifiant « Red Pyramid », plus communément appelé « Pyramid Head » par les fans, dont la puissance symbolique en aura traumatisé plus d’un.
Silent Hill 3 se rattache lui au premier opus en tant que suite directe. Heather, une jeune fille un peu mélancolique, fait ses emplettes dans un centre commercial lorsqu’elle est abordée par un détective privé qui dit avoir des révélations à lui faire sur son passé. Pas intéressée et agacée par son insistance, elle lui fausse compagnie et se retrouve soudain plongée en plein cauchemar.
Heather, héroine de Silent Hill 3Episode injustement mal aimé par beaucoup, Silent Hill 3 renoue avec une terreur plus brute et malsaine par rapport à Silent Hill 2 qui est lui psychologiquement plus oppressant. Ici le monde donne en permanence l’impression d’être au seuil de l’enfer dont le joueur a souvent des visions saisissantes. Sans doute consciente qu’elle n’atteindra pas le summum de mise en abîme et terreur intérieure de l’épisode précédent, la Team Silent s’oriente vers une approche plus schizophrénique de l’horreur, où regarder dans le miroir renvoie l’image d’une réalité qui se gangrène et s’infecte en temps réel et où les lieux a priori rassurant de la vie de tous les jours (centre commercial, métro, parc d’attraction) deviennent la représentation d’une perpétuelle image de fin du monde et de glissement vers le néant.
Le jeu ne débute d’ailleurs pas à Silent Hill même pour une fois, mais à la différence du deuxième qui obligeait le joueur à prendre conscience de l’enfoncement dans la folie dès les premières minutes, le long périple d’Heather pour rejoindre la ville montre que le mal dont elle se rapproche petit à petit se propage hors des limites de la bourgade comme un virus, transformant le monde alentour pour mieux contaminer jusqu’à la perception sensorielle du joueur qui craint de voir sa propre réalité affectée de son côté de l’écran. L’horreur extérieure en somme, en opposition avec celle intérieure et introspective de Silent Hill 2. Il est aussi à noter que c’est à partir de cet épisode que Yamaoka Akira deviendra le producteur de la série.
No way outPour Silent Hill 4, sous titré « The Room », l’équipe tente une nouvelle conception de la peur en enfermant littéralement le joueur. Henry Townshend est un jeune homme qui a emménagé quelques temps plus tôt au 302 South Ashfield Heights. Mais depuis quelques jours il lui est tout bonnement impossible de sortir de chez lui. La porte de son appartement est mystérieusement bloquée par un enchevêtrement de lourdes chaînes qu’il ne peut briser. Il à beau crier personne ne l’entend, pas plus qu’il ne peut communiquer avec l’extérieur en utilisant le téléphone, et la radio et la télé ne captent plus rien. Pourtant quand il regarde à travers la fenêtre ou le judas de sa porte, le monde réel est toujours bien là et tout ce qu’il peut faire c’est de l’observer de loin. Tandis qu’il cherche encore à comprendre ce qu’il lui arrive, un trou apparaît sur un des murs de sa salle de bains, et n’ayant finalement pas d’autres alternatives, il va s’y faufiler pour atterrir dans une réalité parallèle, qui finira sans cesse par le ramener dans cet appartement dont il ne peut s'échapper.
Terreur claustrophobeSilent Hill 4 choisit la voie de la claustrophobie, non seulement de par son point de départ, mais aussi dans le choix de faire évoluer le joueur en vue subjective dès lors qu’il est dans l’appartement. « Impossible de ne pas penser au Locataire de Roman Polanski quand Henry regarde par sa fenêtre durant de longues minutes, ou observe sa voisine par un trou dans le mur »(3). Et si la vue redevient une vue à la troisième personne quand il emprunte un de ces mystérieux « trou de vers » qui l’emmènent ailleurs, c’est pour en définitive toujours rester prisonnier d’une zone délimitée dont la seule voie de sortie est le chemin qui l’y a mené.
Cet épisode a divisé les amateurs de la série, peut être bien parce que ce choix d’enfermer le joueur derrière les yeux d’Henry, lui-même enfermé dans un espace clos et terriblement banal dans sa représentation, provoque un « rapport direct à la réalité (…) sans antécédent, forcément déstabilisant. Au point que (les joueurs soient) sûrement trop choqués par cette intrusion dans leur propre intimité pour adhérer au concept »(3). Silent Hill 4 demeure malgré tout une extraordinaire plongée en immersion dans les méandres de la folie et une audacieuse tentative de renouveler les codes de la série.
Respect totalAvant d’aborder les épisodes qui ont suivi, il convient de s’arrêter un instant sur le film réalisé par Christophe Gans. D’abord parce qu’il constitue en quelque sorte une synthèse des premiers volets, et parce qu’il a été réalisé à un moment clé de certaines évolutions de la licence. Gans, gros gamer devant l’éternel en plus d’être sans doute le cinéphile le plus averti du monde, a toujours déclaré que Silent Hill 2 était pour lui « l’empereur des jeux », et c’est plus ou moins de sa propre initiative que le film a vu le jour. Konami ayant toujours refusé de voir sa licence chérie passer entre les mains de studios peu enclins à en respecter l’essence (et on les comprend, surtout après avoir découvert la quelque part sympathique mais quand même franchement calamiteuse adaptation filmique de Resident Evil), il a fallu qu’il montre patte blanche et ce fut un travail de longue haleine de convaincre ses dirigeants qu’il ne trahirait pas l’univers de Silent Hill. A l’arrivé Konami a fini par lui faire confiance et le pari est gagné haut la main. Et pourquoi ça marche ? Eh bien justement parce que Christophe Gans est un cinéphile ET un gamer, et qu’il a parfaitement saisi la dite essence du jeu, et surtout l’implication émotionnelle unique qu’il a suscité chez celles et ceux qui s’y sont perdu. Son respect scrupuleux de l’imagerie des trois premiers volets et sa parfaite compréhension de ce qui fait la force de la série, à savoir la confrontation avec sa nature humaine propre, font de son Silent Hill la meilleure adaptation à ce jour d’un jeu vidéo à l’écran (et on rêverait de le voir s’attaquer au cas de Metal Gear Solid).
Une bonne copieL’épisode vidéo ludique suivant va marquer une rupture avec le passé, rupture de fond plus que de forme. En effet, une bonne partie de la Team Silent ayant décidé de passer à autre chose, le développement de Silent Hill Origins est confié aux bons soins du studio anglais Climax et le support visé devient la PSP (il sera aussi porté plus tard sur PS2). Seul lien direct avec l’ancienne équipe, Yamaoka Akira qui assume toujours ses fonctions de sound director du jeu en plus de la production. Silent Hill Origins, comme l’indique justement son titre, propose de vivre des événements antérieurs à ceux du premier volet de la série et inclus dans son scénario des éléments directement en relation avec l’histoire racontée dans le film de Christophe Gans. Le fait que la Team Silent ne soit plus aux commandes se fait sentir malgré une reprise scrupuleuse, voire très scolaire de la charte graphique et de l’ambiance « in the mist » des 3 premiers opus, et bien que le titre reste sans aucun doute le meilleur représentant du genre survival sur console portable, il peine à s’imposer après ce qu’il convient d’appeler une véritable réflexion en 4 volets sur la peur, se contentant de remettre un couvert qui a déjà
Hell's kitchenservi tout en n’innovant pas assez et pas comme il faudrait, comme par exemple le fait de déclencher soi-même le passage de la dimension normale à la dimension infernale, ce qui va à l’encontre de la mécanique de la trouille telle que la Team Silent l’avait conçue et ne sert donc plus ici à impliquer émotionnellement le joueur. De plus le charisme d’huître du protagoniste principal Travis Grady, camionneur de son état, ainsi que son pauvre rendu graphique en comparaison de celui des personnages des Silent Hill précédents ne font rien pour arranger l’affaire.
Cette implication émotionnelle, point central de la saga à ses débuts, ne sera pas plus comprise par le studio Double Helix qui se charge de développer Silent Hill : Homecoming, premier épisode à voir le jour sur consoles next gen. En faisant d’Alex Shepherd, le héros de cet épisode, un ancien militaire, c’est l’implication du joueur à son référent qui dynamite d’entrée le rapport à la peur. Car la gaucherie des protagonistes dans les précédents volets, qui se ressentait jusque dans leur maniement, n’était pas un manque d’optimisation des contrôles mais bien un élément de gameplay totalement assumé. Ni Harry, ni James, ni Heather ou Henry ne sont des warriors, mais bien des gens ordinaires confrontés à des situations extraordinaires. La manipulation d’armes diverses ne rentre donc pas dans leur quotidien et la Team Silent avait intentionnellement restitué ce facteur d’importance en incluant une certaine lourdeur dans les agissements des personnages pour rendre plus stressant les affrontements. Alex lui maîtrise parfaitement les armes, ce qui le rapproche automatiquement d’un personnage « classique » de survival, apte par nature à faire face au danger. Le jeu ne parvient pas non plus à innover par
Silent Hill 5. Déceptionrapport à l’ambiance typique de la série et par conséquent donne lui aussi l’impression de suivre le manuel du bon petit Silent Hill à la lettre sans jamais se poser de questions. Il en résulte un gameplay bancal qui balance constamment entre ce respect presque obligatoire d’une charte imposée et une envie de proposer un survival qui se rapprocherait plus des classiques du genre, ceci jusque dans son bestiaire qui rappelle plus les créatures génétiquement modifiées de Resident Evil que les abominations issues des tréfonds de l’âme propres à l’esprit de Silent Hill. Et sur la fin le jeu verse presque dans le « torture porn », sans doute dans une volonté de surfer sur la vague des très en vogue Saw et autres Hostel.
La question que beaucoup se sont naturellement posé suite à cet épisode unanimement décrié est : la licence Silent Hill est-elle morte après la scission de la Team Silent ? Et ne doit on plus s’attendre à l’avenir qu’à des ersatz peu inspirés qui provoqueront dorénavant plus l’ennui que l’angoisse et dont le seul intérêt sera la bande son tant que Yamaoka Akira continuera à être le sound designer de la série ? Fort heureusement le studio Climax, à qui Konami à réitéré sa confiance, a décidé de reprendre la copie de zéro pour revoir les fondamentaux de la saga sous un jour nouveau. Et à la vue du résultat, l’impressionnant Silent Hill : Shattered Memories, on se sent non seulement rassurés pour le futur de la franchise, qui revient enfin à une épouvante plus introspective, mais aussi sur le fait que de nombreuses nuits, moins rassurantes elles, nous attendent encore au détour des rues de la ville maudite.
(1) Christophe Gans in « les cahiers du cinéma – hors série »
(2) Thomas Bourgue sur « sancho-asia.com »
(3) Alexandre Bustillo in « Mad Movies –hors série »